Témoignage de Anne et Corentin sur Guingamp

Témoignage de Anne et Corentin sur Guingamp

  • Ecrit par - ADIJ 22

Témoignage de Anne et Corentin en cohabitation sur Guingamp - Le Télégramme

Entre eux, le courant est passé immédiatement. Anne, pétillante octogénaire de Guingamp, cherchait une compagnie, et Corentin, jeune étudiant de 19 ans, un petit nid. Depuis la rentrée, le duo a entamé une heureuse cohabitation, qui rompt la solitude et allège les frais d’études.

« Tu as intérêt à travailler, sinon tu auras des coups de canne avec moi ! ». Mimant le geste avec malice, Anne, 83 ans, a vite rompu la glace avec Corentin, de 64 ans son cadet. « J’ai peur », rigole-t-il en reprenant la blague au rebond. À les voir se tutoyer et se taquiner, on pourrait croire que ces deux-là se connaissent depuis longtemps. En réalité, cela fait juste une petite semaine qu’ils font bon ménage. Mais, entendons-nous, en tout bien tout honneur. Et ce, dans le cadre du dispositif de solidarité intergénérationnelle, « Un toit, deux générations », encadré par le service jeunesse de Guingamp-Paimpol Armor-Argoat Agglomération. 

« Si j’avais quelqu’un à qui parler… » 

Une idée qui trottait dans la tête de la mamie guingampaise depuis un moment. « Des fois, quand je suis là, toute seule, je me dis que si j’avais quelqu’un à qui parler, ce serait déjà beaucoup. Ne serait-ce, même, que de sentir une présence… J’ai des chambres qui ne servent à rien. Et en faisant ça, je rends service à quelqu’un ». Au printemps, la sollicitation du service jeunesse auprès du club des anciens est donc tombée à point nommé et a fini de convaincre Anne. « Les autres aînés n’étaient pas très chauds. "On ne sait pas à qui on a affaire", qu’ils disaient », raconte Anne qui, elle, avait relevé le numéro de téléphone, sans rien dire à personne. « Alors, un jour, j’ai appelé ». Une animatrice du Pôle Jeunesse est venue chez elle remplir les papiers et, en août, elle rencontrait Corentin. « Je l’ai trouvé aussi gentil que mon petit-fils et je me suis dit qu’il était bien pour moi ! ». Du côté de l’étudiant de 19 ans, cela a aussi « matché » instantanément. « La première chose qui m’est venue à l’esprit, c’est qu’elle était drôle. Elle met à l’aise facilement et elle m’a tout de suite plu. J’ai su que je n’allais pas m’ennuyer ». 

 

Pour l’étudiant en première année de psycho à l’UCO de Guingamp, certes l’aspect financier (*), « surtout bénéfique pour mes parents », a joué, mais pas que. « Ce n’était pas mon premier critère », assure Corentin qui voyait là une bonne occasion « d’échanger et d’apprendre de l’autre ». « Et moi, je ne fais pas ça pour l’argent non plus », renchérit Anne. Preuve, s’il en faut, la Guingampaise va même au-delà du « contrat » passé avec son hôte. Midi et soir, elle se met aux fourneaux. « Je fais comme je faisais avant, pour moi toute seule. Sauf qu’au lieu de cuire une patate, je peux bien en faire deux quand même ! », argumente-t-elle. Un bonus culinaire très apprécié par Corentin. « C’est agréable, je ne le cache pas. Surtout qu’Anne cuisine bien ». Mais, il est prévenu, le soir, ce sera soupe au menu. Un dîner qui se finit devant la petite télévision de la cuisine. « Je suis sûre que ça faisait des années qu’il n’avait pas regardé "Plus belle la vie" », le charrie la maîtresse des lieux. Un programme qui amuse Corentin : « Je n’ai pas la télé chez moi, alors c’est un peu comme une découverte ! ».

« Je sens que j’ai ma place ici » 

De temps en temps, le jeune homme sera sollicité pour rendre quelques services. « S’il est disponible, je serai contente qu’il vienne avec moi faire les courses ou changer la bouteille de gaz », souffle Anne, contrainte de s’appuyer sur sa canne pour se déplacer. Une demande aussitôt validée. « Je sens que j’ai ma place ici, je ne suis pas mis à l’écart », mesure avec plaisir l’étudiant néo-guingampais qui, en plus de goûter aux bons petits plats, n’est qu’à quelques minutes à pied de sa fac. « J’ai une amie qui fait l’aller-retour Saint-Brieuc-Guingamp tous les jours. Elle doit se lever à 5 h du matin et elle sent déjà que ça va être compliqué à gérer sur l’année… Pour moi, la question du transport est aussi un stress en moins ». Bref, un dispositif gagnant-gagnant, dans lequel le duo semble avoir déjà trouvé ses marques. Et qu’en pense la famille d’Anne ? « Je ne leur en ai parlé que quand l’affaire était faite ! Mais, ils ont très bien réagi. Mes petits-enfants m’ont dit qu’ils auraient bien aimé profiter de ce dispositif pendant leurs études ». Et au club des anciens, comment a-t-on pris la nouvelle ? « Tout le monde n’est pas au courant. Mais, c’est sûr, la prochaine fois que quelqu’un me dit qu’il s’ennuie à la maison, je lui répondrai : "T’as qu’à faire comme moi !" ».

(*) Le loyer est de 15 € par semaine (du lundi au vendredi) ou de 20 € si l’étudiant reste aussi le week-end

Article par Marina Chélin pour Le Télégramme du 12/09/2017